Savez-vous que 50% des entreprises, tous secteurs confondus, meurent avant leur 5ème année d’existence ? Et cela en temps « normal », c’est-à-dire sans crise ou cause exogène particulière.
En y regardant de plus près, les entreprises qui ont une raison d’être, puis des objectifs, clairement définis ont un « taux de survie » nettement supérieur, et une partie d’entre elles sont extrêmement prospères.
L’une des raisons est qu’un dirigeant qui incarne fortement une mission et des valeurs, est comme un aimant pour les personnes qui s’y reconnaissent.
L’auteur Simon Sinek a très bien décrit ce phénomène dans son livre « Commencer par Pourquoi » : les leaders ont d’abord une raison d’être, une mission qui les remplit d’énergie et d’enthousiasme, parce qu’ils sont convaincus de la valeur qu’ils ont à apporter. Leur entreprise est en fait leur prolongement, l’instrument au service de cette raison d’être.
A titre d’exemple, citons Steve Jobs, co-fondateur d’Apple : « Mon Job essentiel est de rappeler la mission de l’entreprise… On ne construit pas des ordinateurs, on transforme le quotidien des hommes »
La puissance du “pourquoi”
Cette notion de raison d’être, remise depuis peu en valeur, prend encore plus de sens en cas de crise.
Pourquoi ? Parce que quand nous perdons nos repères dans un environnement méconnaissable, ce qui nous reste est notre boussole intérieure : notre raison d’être et nos valeurs cardinales. C’est donc grâce à elles que nous sommes capables de traverser les turbulences, parce que nous savons où nous allons. C’est comme la lumière d’un phare qui indique le cap.
Le « pourquoi » agit aussi comme un moteur qui nous met en mouvement. Il est plutôt stable et varie peu dans le temps, car il correspond à ce qui est porteur de sens pour nous : on ne se laisse donc pas dérouter.
Alors, tout particulièrement en période de totale incertitude, nous pouvons nous reposer la question : mon entreprise a-t-elle une vocation claire, pour moi en tant que dirigeant, mais aussi pour mes collaborateurs et mes clients ? Ou bien cette raison d’être s’est-elle diluée avec le temps, jusqu’à être si peu partagée qu’elle est mal connue ou mal comprise ?
Question d’autant plus cruciale que c’est la raison d’être, ou le « pourquoi », qui nous donne une détermination inébranlable pour trouver des solutions, nous renouveler et surmonter les obstacles, pendant que d’autres sont à l’arrêt. C’est lui aussi qui nous permet d’inspirer, de faire vibrer la corde émotionnelle des gens. Les neuroscientifiques nous confirment d’ailleurs que le« pourquoi » est géré par la partie limbique, émotionnelle, de notre cerveau.
Il mériterait donc d’avoir la 1ère place sur le podium de notre questionnement. Avant le « quoi » et le « comment ».
Mais… dans notre société cartésienne et analytique, il faut pouvoir justifier ses choix et décisions de manière rationnelle.
Le double pouvoir du “Quoi”
C’est sans doute pourquoi nous commençons généralement un projet par le « quoi » : « Qu’est-ce que je veux construire ou développer ? Quels sont mes objectifs ? »
En effet, la fixation d’objectifs, le « quoi », est gouverné par la partie analytique du cerveau, le cortex.
Le « quoi » va traduire le « pourquoi » ou la vision en offres. Il le matérialise en produits ou services, et répond à la question : « que pouvons-nous développer, apporter à la société, en cohérence avec notre « pourquoi »? Il en est la concrétisation, la manifestation tangible et « mesurable ».
Contrairement au pourquoi, les offres et les objectifs seront appelés à varier dans le temps pour s’ajuster aux évolutions sociétales, environnementales, etc.
Nous en avons de multiples exemples : les filières de la mode, de l’agriculture, des transports, du tourisme, doivent plus que jamais réinventer leurs modèles économiques et leurs offres pour continuer à servir leur raison d’être d’origine (habiller, nourrir, transporter, apporter du rêve, etc), avec des vents totalement contraires.
La clarté « Celui qui n’a pas d’objectifs ne risque pas de les atteindre. » Sun Tzu
A cette étape, c’est donc le cortex, la partie analytique de notre cerveau qui est aux manettes et nous aide à fixer nos objectifs. Ces derniers seront à la fois la traduction chiffrée et rationnelle, et la justification du « pourquoi ».
Fixer des objectifs a un grand pouvoir : celui de la clarté. Savoir clairement où nous allons est essentiel pour passer à l’action. En effet, ne pas avoir d’objectifs équivaut à avancer dans le brouillard. Vous souvenez-vous de votre dernière sortie en voiture dans un brouillard épais ?…
La clarté et la définition d’objectifs précis vont dès lors enclencher un processus redoutable d’efficacité, et d’autant plus extraordinaire qu’il est inconscient : le cerveau va partir à la recherche de toutes les informations utiles et congruentes pour le projet.
Prenons un exemple pour illustrer ce processus. Imaginez que vous ayez décidé de vous mettre au tennis : à partir de cette décision et sans effort particulier, vous allez capter dans votre environnement toutes les informations liées à ce sport (pub, articles, TV, magasins de sport, conversations, etc), alors qu’auparavant vous n’y prêtiez aucune attention.
La clarté permet donc à son tour le focus et évite la dispersion. Agissant comme un laser, le focus est une des clés de la réussite, puisqu’il nous permet de concentrer toute notre énergie sur le but à atteindre.
Ensuite viennent les indicateurs de mesure et de pilotage.
La confiance
Fixer des objectifs clairs a un autre grand pouvoir : celui de nous rassurer sur la faisabilité de notre raison d’être. La méthode « SMART » bien connue permet cette rigueur :
- Spécifique : un objectif par action,
- Mesurable : un indicateur de résultat par objectif,
- Atteignable : liste des différentes étapes vers l’objectif,
- Réaliste : moyens et ressources prévus (collaborateurs, finances, temps, matériel et outils, etc),
- Temporellement défini : une échéance par objectif
Quelle que soit l’envergure d’un projet, la réponse au « quoi » par cette méthode nous permet de passer à l’action en toute confiance, en validant la vision produite par notre cerveau émotionnel.
Elle permet de le découper en phases simples, poser des jalons, mesurer et rectifier si besoin. N’oublions pas que notre cerveau aime la simplicité !
Enfin, si le pourquoi et le quoi sont alignés, la cohérence globale vient consolider la confiance.
Alors un cercle vertueux se met en place : la clarté génère le passage à l’action, qui à son tour crée de la confiance qui elle-même réenclenchera le passage à l’action etc…
“Comment”, un pont entre vision et réalisation
Nous avons la vision, nous savons ce que nous voulons construire et offrir. Nous devons maintenant définir l’étape intermédiaire, autrement dit la stratégie.
Ce qui nous donne très schématiquement :
Le « comment » est un pont entre le « pourquoi », et le « quoi ».
Il correspond à la stratégie, aux supports, structures et process.
Alors qui porte la stratégie ? Naturellement chaque cas est différent, selon que l’on crée une entreprise seul ou à plusieurs.
Le cas le plus lourd à gérer au fil du temps est certainement celui du fondateur unique, censé porter à la fois la raison d’être, la vision moyen terme et la stratégie. Trouver l’équilibre et tout assumer au-delà d’une certaine taille de structure devient extrêmement difficile. Avec l’opérationnel quotidien, le risque peut être de perdre peu à peu sa raison d’être, ou de négliger la réflexion stratégique.
C’est pourquoi savoir s’entourer est vital pour un dirigeant, à l’intérieur comme à l’extérieur de son entreprise : « stratèges », internes ou extérieurs, conseils, partenaires, etc alimenteront un « cerveau collectif » stimulant. Ils concevront un plan d’actions qui permettra à l’idée de départ de se matérialiser sur le marché.
Un stratège est également une sorte de traducteur. En effet, le « comment », tout comme le « pourquoi », siège dans le cerveau limbique, émotionnel, et n’est donc pas relié à la zone cérébrale qui gère le langage.
Le défi du stratège est donc de réussir à traduire l’idée du fondateur pour qu’elle soit bien comprise par les équipes de terrain, puis par le marché. Il doit trouver les process, les canaux, et aussi les meilleures formes d’expression du « pourquoi » de l’entreprise : ce peut être à travers des mots, ou encore des images ou des symboles. Nous avons tous en tête des logos, symboles et signatures qui portent toute la philosophie d’une entreprise ou d’une marque, véritables signes distinctifs pour toute personne qui s’identifie à ce symbole. Citons par exemple la « virgule » de Nike, ou la célèbre « pomme », auxquelles les clients fidèles s’identifient.
Savoir construire et renouveler l’équipe Dirigeant(s)-Stratège(s) est donc fondamental pour le succès et la pérennité de l’entreprise, car cela construit un lien de confiance avec le marché sur le long terme.
C’est pourquoi le dirigeant doit constamment veiller à incarner ou exprimer suffisamment ses valeurs et sa cause, pour que le stratège puisse continuer de les « traduire » vers l’extérieur.
La raison d’être ou le « pourquoi » : une boussole pour garder le cap en période trouble et mieux rebondir à la sortie
On l’a vu, le « pourquoi » est le feu qui, non seulement donne envie d’entreprendre et de contribuer, mais aussi qui inspire tout l’écosystème de l’entreprise : collaborateurs, clients, partenaires, fournisseurs…
Revenir à cette source est certainement fondamental pour prendre des décisions malgré l’incertitude, parce que vous savez au fond de vous « pourquoi » vous faites tel ou tel choix.
Et si cette raison d’être n’est plus totalement d’actualité dans un contexte en plein bouleversement, n’est-ce pas le meilleur moment pour y réfléchir ?